Episode 3 : L’église de Chamonix, une histoire millénaire

Romane puis baroque l’église du Prieuré a été ensuite marquée de l’empreinte de la Révolution puis par la période et le style Directoire et Empire tout en restant entre les mains des artistes-artisans piémontais

Après l’incendie de 1758, la Révolution atteint la région en 1797 et abat la flèche du clocher roman qui est remplacé par un clocher à bulbe savoyard recouvert de fer blanc doré édifié par les habitants dont le guide Cachat le Géant. Cette même Révolution fait disparaître deux des trois cloches installées en 1761. Les fenêtres géminées qui ornaient la partie haute disparurent une à une pour laisser place aux nouvelles cloches et à l’horloge. Seule subsiste une fenêtre romane sur la façade Est. 

L’édifice va beaucoup changer au XIX ieme siècle tant dans son architecture extérieure que dans son aménagement intérieur et notamment son décor.Un document atteste qu’en 1809 il n’y avait que trois autels : le maître-autel et ceux du Rosaire et des Carmes.

En avant de la façade du XVIII ieme siècle fut édifiée, en 1840 une façade d’inspiration Directoire, formée d’un péristyle à quatre colonnes que surmontait un fronton triangulaire. Cette nouvelle structure extérieure fut d’ailleurs de courte durée puisqu’elle fut remplacée dès 1864 par une façade en granite, telle que nous la connaissons aujourd’hui. L’église avait été agrandie, la même année, d’une travée grâce à des fonds sardes alors que la Savoie avait été rattachée à la France 4 ans plus tôt. Et c’est au cours du réaménagement intérieur en 1864 que fut trouvée, gravée sur un bloc de tuf , la date de « 1119 » , à l’occasion de la démolition de l’ancien portail où ils avaient été protégés.

A l’intérieur on a entrepris d’effacer les dégâts de l’incendie outre la toiture, en confiant dès 1760 la réfection à Claude -Joseph Simond de Cluses puis 30 ans plus tard à Charles Garzia et Pierre della Jacoma, chargés de reprendre le décor en s’inspirant des couleurs et des croix de consécration de l’église de Servoz.

En réalité beaucoup d’éléments baroques de la décoration intérieure ont disparu. On ne sait pas ce qu’ils sont devenus . Les longs procès entre les communiers de Chamonix et le Chapitre de Sallanches qui s’en suivirent sont muets sur ce point. Mais de nombreuses factures de restauration des retables postérieures à l’incendie laissent planer  un doute, selon René Simond, le spécialiste de la restauration contemporaine  de l’église. Selon lui il est bien possible que l’on ait alors sacrifié  au goût du jour, au nouveau style du début du XIX ieme siècle : le style Empire.

En 1824,  c’est au sculpteur d’Annecy Pandrini qu’est confiée la réalisation de trois retables de style Empire achevés en 1836-38 financés par 1800 livres offerts par la Compagnie des guides. Des travaux réalisés à nouveau par des artistes du Valsesia piémontais. La preuve ?  La signature sur le socle de la statue de la Charité qui surmonte le dôme du retable du maître-autel et sur l’un des angelots en bas relief sur le fronton du retable de droite du transept. On peut lire :  « 24 juillet 1838. Giacomo Montelli fils de feu Pietro  de la Cavata di Campertogno. » Les années 1830 ont en effet été marquées d’une importante rénovation : murs et voûtes reblanchies par Pralong, de Taninges , changement des fonts baptismaux et nouveaux retables. Les rares documents iconographiques de la fin du XIXeme siècle font découvrir une église abondamment ornée, les grands tableaux du Chemin de Croix étant disposés sur la corniche entre les fenêtres.

Le retable de l’autel majeur  porte donc la marque du style Empire. Il est d’ailleurs inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques ainsi que les retables du transept.  Les feuillages de  la frise baroque ont alors été recouverts de vert Empire ainsi que les piliers en faux marbre. La statue de Saint Michel provient sans doute de l’autel du XVIII eme siècle. Le saint Patron de la paroisse y est représenté  avec le glaive de la Justice et la balance de la pesée des âmes sous un dais couronné d’un dôme à décor d’écailles. Les statues du dôme,  œuvre  de Jacques Montelli en 1838, symbolisent la Foi, la Charité, l’Espérance, les trois vertus théologales.

On sait que le premier maître autel a été réalisé par des spécialistes piémontais dès l’achèvement de l’église baroque en 1711-12, le retable ayant été  agrandi et complété  par un sculpteur originaire du duché de Milan, domicilié à Saint Maurice en Valais, répondant au nom de Jean Bozzo et qui travaillait alors aux Houches. Les retables latéraux dont les autels étaient consacrés à Notre Dame du Rosaire et au Saint Esprit, édifiés en 1721-23, étaient également l’oeuvre de maîtres venus d’outre  Mont-Blanc.

Il faut noter que les lustres baroques avaient été conservés lors de la mise en place des nouveaux retables. Quelques uns de style Empire avaient été ajoutés. Ils n’ont pas résisté à la restauration  de 1956!

Jean- Paul Roudier

Dernier volet : trois restaurations et un classement historique au cours du XXième siècle

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