Alors que le Prieuré est passé sous la tutelle de la Collégiale de Sallanches, une nouvelle église Saint Michel est construite en style baroque au XVIIIeme siècle en remplacement de l’église romane des Bénédictins tombée en ruine.
En 1522, alors que le Prieur Guillaume de la Ravoire vieillissant vient de confier la gestion temporelle du prieuré de Chamonix au Chapitre de la Collégiale de Sallanches, un incendie détruit l’église de Chamonix, le Prieuré, le presbytère et le bourg du village. « Il est vraisemblable que la décadence de cette première église date de cette époque » écrit Paul Payot, dans son ouvrage « Au royaume du mont Blanc ».
Pendant près de deux siècles, quelques réparations sont faites à l’église des Bénédictins. Mais elles se révélent insuffisantes pour éviter la ruine progressive du bâtiment.
En 1702 on démolit la nef jusqu’aux fondations, on abandonne le choeur devenu une masure remplie du débris des voûtes et des murs, et l’on conserve ce qui a résisté à l’incendie : la tour du clocher, sur laquelle s’appuiera le futur édifice qui sera construit perpendiculairement à l’ancien, c’est-à-dire dans le sens de la pente. En 1707, on procède à une levée de fonds pour financer cette reconstruction et à des engagements de dons pour la fabrication du retable, dont 200 florins de la part du Chapitre de la Collégiale de Sallanches.
En ce début de XVIIIeme siècle, l’époque n’est plus à une architecture romane. Le Duché de Savoie dont le Faucigny fait partie, doit faire face à la montée en puissance de la Réforme protestante qui écarte les ducs de Savoie de Genève, où Calvin impose rigueur, austérité, dépouillement jusque dans les lieux de culte où disparaissent les statues.
La contre-réforme se met en place dans le Duché où Charles Borromée, archevêque de Milan, donne, dans les « Actes de l’église de Milan » de 1643, ses instructions pour que l’on reconstruise des églises et des chapelles dans les vallées alpines, prenant le contrepied du calvinisme : faire entrer la lumière, aménager des coupoles, favoriser les dorures, les retables, la décoration vive, clore le cimetière autour de l‘église etc … : L’art baroque prend alors le pas sur le roman et ce sont les peintres sculpteurs du Val Sesia en Piémont qui apparaissent comme les spécialistes. De 1650 à1770 , on superpose, on agrandit, on construit des églises selon les canons de cet art.
Et c’est ainsi que les maitres-maçons piémontais Jean de la Vogna, Pierre Rouge et Antoine Gianetta, de 1707 à 1709, construisent la nouvelle église Saint Michel du Prieuré pour la somme de 9000 florins de Savoy, cette somme ne comprenant que le prix de la nef, le choeur étant édifié aux frais de la Collégiale de Sallanches. Le nouveau sanctuaire est coiffé d’un toit en croupe tel qu’il est représenté sur une célèbre gravure de Birmann, toit qui se retourne sur la façade privant ainsi l’église du cachet des belles façades baroques de Saint Gervais ou des Contamines Montjoie.
En 1712 se termine la construction du grand retable dont il ne reste rien aujourd’hui. Oeuvre des maîtres italiens, il avait coûté 1940 florins, ce qui était considérable pour l’époque. Le document, rédigé le 8 septembre 1714 lors de la consécration de l‘église par Mgr Rossillon de Bernex, précise qu’elle a été édifiée avec les paroissiens et le syndic de Chamonix qui ont pris en charge la démolition de l’ancien lieu de prière, le creusement des fondations et la fourniture des matériaux.
Les chanoines construisent le choeur.
Le nouveau retable du maître -autel apparaît en 1721-22. Il aura coûté 1920 florins. De cette floraison baroque il reste aujourd’hui la frise de la grande corniche, les croix de consécration, la statue de Saint Michel sur le maître autel, les angelots qui surmontent les tableaux des retables du transept, des tableaux du chemin de croix entre autres…
L’église romane des Bénédictins

Deux évènements importants vont marquer l’histoire du Prieuré dans la deuxième moitié du XVIIIeme siècle.
D’abord le 3 décembre 1758, un nouvel incendie ravage l’ensemble du Prieuré, le coeur du village tout proche et l’église. La charpente, la couverture en ancelles de mélèze et une partie du mobilier de l’église flambent. Les cloches fondent. Longtemps l’église portera les traces du sinistre.
Pourtant dès l’année suivante c’est un charpentier de Vallorcine répondant au nom de Burnet qui reconstruit la charpente et la toiture. Les quatre retables des autels latéraux ont été eux aussi endommagés. Certains auraient purement et simplement disparu dans le feu.
Quant à la Maison forte abritant le Prieuré, elle n’aurait été reconstruite qu’aux deux tiers. L’autre évènement intervient en 1786, l’année de la première ascension du mont Blanc par Balmat et Paccard : après une histoire tumultueuse avec la Collégiale de Sallanches, les Chamoniards obtiennent leur affranchissement de cette autorité de tutelle.
On entre alors dans une autre époque : celle de la Révolution,
du Directoire et de l’Empire qui vont marquer durablement
l’édifice religieux Saint Michel.
Jean- Paul Roudier